Comment s’y retrouver dans les articles, les commentaires, les publications, les commentaires de commentaires, les spécialistes, les journalistes, ceux qui se pensent spécialistes, les ayatollahs, les agnostiques, ….
Petite tentative pour y voir + clair (ce n’est pas gagné !)
D'ailleurs, qui a vraiment parcouru et lu les publications du GIEC ...(IPCC en anglais) ?
J'avoue que le sujet est ardu, il faut de la patience.
Accès aux rapports ici (en anglais).
Reprenons depuis le début.
Depuis plus de 800 000 ans (il faut bien prendre une borne dans le passé !) jusqu’au milieu du XIXème siècle, début de l’ère industrielle, la teneur en CO2 dans l’atmosphère a fluctué grosso-modo entre 200ppm et 300 ppm.
(1ppm= 1 partie par million = 10-6, en volume).
Reconstructions de la température annuelle en Antarctique (en degré Celsius) et de la concentration en CO2 (en partie par million en volume) à partir de la carotte de glace forée à EPICA Dome C.
Credit Laboratoire de Glaciologie et Géophysique de l'Environnement (LGGE) Grenoble.
L’analyse spectrale de ces fluctuations fait ressortir les périodes principales (~ 20000, 40000, 110000 ans) des 3 cycles astronomiques de Milankovitch (excentricité, obliquité, précession) sur lesquels l’homme n’a aucune prise et que, d’ailleurs, l’homme ne ressent pas lors de sa courte existence (échelles de temps très différentes).
Soyons clair : la corrélation entre CO2 et Température, flagrante sur cette figure, ne signifie pas que le CO2 est obligatoirement la cause des variations de température : ces fluctuations sont avant tout le fait des cycles astronomiques.
Toutefois le même type d’analyse sur des périodes récentes (-20000ans) suggère que CO2 et Température en Antarctique ont commencé à augmenter en même temps. Le CO2 peut être fortement soupçonné d’être l’un des principaux acteurs des réchauffements passés.
Le plus important à retenir ici est la corrélation δCO2 <> δT.
Rappelons au passage que c'est la présence des GES (dont le CO2) dans l’atmosphère durant des centaines de milliers d'années qui a permis l’instauration d’un équilibre thermique à la surface de la terre par l’effet de serre dit « naturel ».
Grâce à lui la température moyenne à la surface du globe est de 15°C (288K) et la vie a pu s’y développer.
A partir de la loi de Planck simplifiée (ou loi de Stefan) : Φ=σ.T4,
la terre en l’équilibre émet autant d’énergie (σ.2884 = 390W/m2) qu’elle en reçoit (168+324-78-24=390 W/m2).
Dans le bilan global, que j'ai essayé de résumer ci-contre, l’absorption d'une partie de l'énergie par les gaz à effet de serre (H2O, CO2, CH4, N2O, O3, …) dans l’atmosphère joue donc un rôle vital.
Ce bilan, exhaustif, exprime l'ensemble des échanges énergétiques (Espace - Atmosphère - Terre) et l'équilibre qui en résulte.
Reprenons à notre analyse : donc il y a 800 000 ans, hier à l’échelle de l’histoire de la terre, les hominidés s’étaient depuis longtemps diversifiés en plusieurs espèces (homo erectus, homo sapiens, homo néanderthalensis, …).
Pendant ces 800 000 ans l’espèce humaine a subi des changements climatiques « naturels » liés à ces paramètres astronomiques, a résisté, s'est adaptée.
Avec bien entendu, comme toujours aujourd’hui, le cycle des saisons (lié à l’inclinaison de l’axe de rotation de la terre sur le plan de l’écliptique) qui rythme notre climat sur l’année.
Les variations de cette concentration de CO2 ont été de ±20% autour de la valeur moyenne (250ppm) pendant 800000 ans. Les changements les plus rapides (voir courbe plus haut) entre les extrêmes (200ppm/300ppm) ont pris … plusieurs milliers d’années.
Le cycle du carbone permet de réguler ces fluctuations (échanges biologiques et échanges physico-chimiques).
Quid aujourd’hui ?
C’est un fait établi ce mois-ci : la concentration en CO2 dans l’atmosphère vient de dépasser le seuil symbolique des 400ppm …
Cette concentration, qui était autour de 280ppm au début du XIXème siècle, a donc augmenté, de manière exponentielle, de 40% en l’espace de 200 ans.
Si je trace la courbe temporelle depuis les temps reculés, c’est l’équivalent d’un Dirac.
Par ses activités, l’homme a complètement changé l’échelle de temps, j'allais dire les règles du jeu ...
La corrélation δCO2 <> δT des archives climatiques vue plus haut parle d’elle-même : l’augmentation des concentrations actuelles en CO2 ne peut que produire un réchauffement …
Pas besoin d’être devin pour trouver l’origine de cet afflux de Carbone : le lien de cause à effet est à trouver principalement dans la combustion massive de nos énergies fossiles depuis le début du XIXème siècle.
Pétrole, gaz, charbon. Les lois de la chimie sont là :
La combustion de l’essence : C8H8 + 10 O2 → 8 CO2 + 4 H2O
La combustion du charbon : C + O2 → CO2 [+ 33 kJ/g C]
La combustion du gaz (méthane, butane) :
CH4 + 2 O2 → CO2 + 2 H2O [+ 56kJ/g]
2 C4H10 + 13 O2 → 8 CO2 + 10 H2O [+ 50kJ/g]
Avant 1800, quasiment zéro CO2 d’origine fossile était émis.
Connaissant les masses de combustible fossiles extraites depuis surtout 1850, les scientifiques en ont déduit les masses de CO2 et équivalents émises.
Aujourd’hui nous ne sommes pas loin de 50Gt/an de GES équivalent CO2 pour l’ensemble de la planète …
Cet historique ci-contre est extrait d’une récente publication du GIEC [Climate Change 2014, Synthesis Report, Summary for Policymakers].
Les scientifiques estiment que nous avons rejeté 750 Gt d’équivalent CO2 entre le début de la révolution industriel et l’année 1970 (1G= 1giga = 109= 1 milliard), et pratiquement le double (1250Gt) depuis cette date à aujourd’hui !
Certes les écosystèmes terrestres et océaniques (cycle et réservoirs du Carbone : atmosphère, biosphère, océan, sous-sol) ont une grande capacité à absorber une proportion non négligeable des émissions anthropiques de CO2.
Certains auteurs estiment même que près de la moitié du CO2 d’origine anthropique émis depuis le début de l’ère industrielle aurait été capté. C'est un point que j'aimerais vérifier.
Mais le bilan n’est pas vraiment neutre, l’atmosphère reste le réservoir le plus affecté par les activités anthropiques : la quantité de carbone absorbée y a augmenté de près de 40 % par rapport à l’ère préindustrielle.
D’où ces 400 ppm.
Plus de CO2, dont plus d’absorption de rayonnement IR dans l’atmosphère, conduisant à un déséquilibre dans le bilan radiatif de la terre présenté plus haut.
Le rééquilibrage de ce bilan thermique a pour conséquence une augmentation de la température moyenne (rétroaction).
Pour donner un ordre d’idée, dans la loi de Planck, un accroissement de 2° (15°C > 17°C) aboutit à une augmentation de flux radiatif de ~ 10W/m2 .
Taille des réservoirs aux temps préindustriels en milliards de tonnes d’équivalent
CO2 en noir et leur variation sur la période 1750-2011 en rouge. Source.
Le sujet est vaste...
Disons rapidement quand même (cela mériterait un développement) que les climatologues ont construit des modèles numériques représentatifs (du moins ils essaient et ils les améliorent chaque jour) des phénomènes physiques en action entre atmosphère, lithosphère, hydrosphère, .. qui ont été validés sur la connaissance des climats passés.
L'utilisation de ces modèles 'bruts' sur les 150 dernières années montre qu'il y a un écart par rapport aux observations (voir ci-contre courbes noire et bleue).
Il faut modifier ces modèles, en y intégrant les effets anthropiques, pour obtenir alors la cohérence avec les observations (courbes noire et orange).
CMIP5 - Coupled Model Intercomparison Project Phase 5 (GIEC)
Ces modèles adaptés permettent de faire des prévisions moyennes de toutes sortes (température, élévation niveau océans, température des océans, ...).
Exemple ci-contre (Source GIEC), où les calculs de la température moyenne ont été menés jusqu'en 2100, pour différents scénarii d'émission de GES (appelés RCP) d'ici la fin du siècle : forte atténuation (RCP2.6), moyenne (RCP4.5 et RCP6.0), peu d'effort (RCP8.5), avec différentes probabillités d'occurence ....
Tout ceci est consultable en détail dans les rapports du GIEC.
Pour conclure et faire le lien avec la COP21, il est fondamental que les pays s'engagent ensembles vers des objectifs quantifiés en précisant les solutions envisagées (il ne faut pas que le remède soit pire que le mal).
Aujourd'hui chaque français émet en moyenne 8t CO2/an, soit ~500 millions de tonnes pour l'ensemble de la population, soit encore # 1% de l'émission mondiale.
La France s'est donnée pour objectif de passer à 2t CO2/an en 2050.
La somme des efforts particuliers sera l'intérêt général.
Je ne donnerai pas ici les actions pratiques à mener pour y parvenir, il y a pléthore d'exemples en ce moment ...
Reste les climato-sceptiques, voire les sceptiques tout court. Tant pis.
Les civilisations passées jusqu'au Moyen Age avaient la vision d'un monde plat et infini. L'homme utilisait la nature qu'il croyait inépuisable.
Or la terre est ronde : nous vivons dans un espace fini, les ressources sont limitées, c'est un fait.
Et l'exploitation de ressources ailleurs dans l'univers risque d'attendre encore un peu !!
Il ne s'agit pas de malthusianisme, d'un futur de restriction, de retour en arrière mais au contraire d'une porte ouverte vers d'autres futurs.
L'imagination de l'homme est sans limite.